Structure rythmiqueLes
rythmesde la musique du rap (ce n'est pas toujours le cas des paroles) sont
quasiment toujours des rythmes 4/4 ou 2/2. Dans sa base rythmique, le
rap « swingue ». S'il ne compte pas un rythme 4/4 carré (comme dans la
musique pop, le rock, etc.), le rap se base plutôt sur un sentiment
d'anticipation, un peu similaire à l'emphase du
swing que l'on retrouve dans le
jazz.
Comme celle-ci, le rythme rap comprend une subtilité qui fait qu'il est
rarement écrit comme il sonne. C'est en quelque sorte un rythme 4/4
basique auquel s'ajoute l'interprétation du musicien. Il est souvent
joué comme « en retard », d'une manière détendue et douce.
Ce style a été amené de manière prédominante par les musiques
soul et
funk, lesquelles répétaient tout au long des morceaux leurs rythmes et leurs thèmes musicaux. Dans les années 1960 et 70,
James Brownjette les bases sur lesquelles sera fondé le rap : une musique rythmée
(ses enregistrements sont encore aujourd'hui une source de
samplesinépuisable pour les DJ), un style de chant saccadé, parfois parlé ou
crié et des textes véhiculant une forte identité et des revendications
sociales ou politiques (en particulier
Say It Loud, I'm Black And I'm Proud qui devient un véritable hymne de la communauté noire américaine). C'était le parfait tremplin pour pousser les
MCà écrire leurs rimes. C'est d'ailleurs toujours ce qui attire le plus
dans le rap : l'emphase mise sur les paroles et la prouesse de leurs
élocutions. Le
rap instrumental est peut-être la rare exception à cette règle. Dans ce sous-genre du rap, les
DJ (ou
disc jockeys)
et les producteurs sont libres d'expérimenter avec la création de
morceaux instrumentaux. Tandis qu'ils peuvent prendre des sources
sonores comportant des voix.
Instrumentation et productionL'instrumentation rap découle de la musique
disco, funk et
R&B,
à la fois sur le plan de l'équipement sonore et des albums
échantillonnés. Alors que le mixage réalisé par les DJ disco et de
clubs avait pour but de produire une musique continuelle avec des
transitions discrètes entre les morceaux, celui réalisé par
Kool DJ Herc a lui donné naissance à une pratique visant à isoler et à étendre les seuls
breaks en les mélangeant entre eux avec deux copies du même morceau. À l'origine, les
breaks (ou
breakbeats) étaient les transitions à l'intérieur d'un morceau, composées surtout de percussions. C'est ce qu'
Afrika Bambaataa décrivit comme « la partie du disque qu'attend tout le monde... où ils se laissent aller et font les fous » (Toop, 1991).
James Brown,
Bob James et
Parliament - parmi d'autres - ont longtemps été des sources populaires pour les
breaks.
Sur cette base rythmique, on pouvait ajouter des parties instrumentales
provenant d'autres albums (et beaucoup l'ont fait). L'instrumentation
des premiers
samples utilisés est la même que celle de la musique funk, disco ou
rock : voix, guitare, basse, clavier, batterie et percussions.
Alors que l'originalité de la musique rap provenait principalement des
breaks des albums du DJ, l'arrivée de la
boîte à rythmes (appelée en anglais
beat box ou
drum machine)
a permis aux musiciens du rap d'intégrer des fragments originaux à leur
musique. Les sons de la boîte à rythme étaient joués soit par-dessus la
musique produite par le DJ, soit seule. La qualité des séquences
rythmiques est progressivement devenue centrale pour les musiciens de
rap, car ces rythmes étaient la part la plus dansante de leur musique.
En conséquence, les boîtes à rythme ont rapidement été équipées pour
produire des
kicks (sons de
grosse caisse)
avec une basse puissante et sinusoïdale en arrière-plan. Cela a permis
d'émuler les solos de batterie bien produits de vieux albums de funk,
de soul et de rock datant des années 1960 et 70. Les boîtes à rythme
avaient de plus un stock limité de sons prédéterminés incluant des
cymbales, des grosses caisses, des
caisses claires et des
toms.
L'introduction des
échantillonneurs(ou sampleurs) a changé la manière dont le rap était produit. Un
échantillonneur permet d'enregistrer et de stocker numériquement des
petits passages sonores provenant de n'importe quel appareil disposant
d'une sortie électrique, comme une
platine-disque.
Les producteurs ont donc pu échantillonner les sons de batterie des
albums de leur jeunesse. Plus important encore, ils ont pu sampler des
sons de cuivre, de basse, de guitare et de piano à ajouter à leurs
rythmes. Et le rap avait finalement son orchestration au grand complet.
Le caractère dur et énergique des sonorités de la musique rap,
souvent assez éloignées du son plus organique des autres genres
musicaux, constituent un obstacle à la reconnaissance du genre en tant
que forme artistique à part entière. Même les groupes de rap ayant un
orchestre utilisent souvent les samples et le son dur et énergique des
machines pour créer leurs rythmes en studio (lors de concerts, ils les
recréent habituellement avec un orchestre). Le rap est l'objet d'une
méprise répandue selon laquelle les samples et les boîtes à rythme sont
des techniques pour musiciens paresseux ou encore qu'ils ne sont qu'une
pâle compensation pour un « véritable » orchestre (cette considération
étant d'ailleurs courante pour toute musique faisant usage de ces
techniques). Dans les faits, les producteurs de rap sont souvent à la
recherche d'un timbre, d'une texture et d'une fréquence précis pour
leur
sample et leur séquence rythmique. Un batteur jouant en direct le
break de
Funky Drummerde James Brown ne peut se substituer à son sample. Toutefois, on peut
noter ces dernières années une tendance de retour vers les instruments
originaux avec des musiciens et producteurs tels que
Timbaland,
Outkast,
The Roots et
The Neptunes.